ECOLE POLYIECHNIQUE - ESPCI
CONCOURS D'ADMISSION 2019
VENDREDI 19 AVRIL 2019 - 8h00 - 12h00
FILIERE PC - Epreuve n° 3
PHYSIQUE A
(XE)
Durée : 4 heures
L'utilisation des calculatrices n'est pas autorisée pour cette épreuve
Étude de la mécanique de l'audition humaine
Nous nous proposons d'étudier les principaux mécanismes qui entrent en jeu dans
l'audition.
L'oreille humaine se décompose en trois parties (Figure 1) que nous allons
étudier successivement.
-- Les différentes parties de ce problème sont indépendantes et peuvent donc
être traitées
séparément.
-- Certaines questions ne requièrent aucun calcul : vous serez alors évalué(e)
sur la qualité
de votre argumentation et votre sens physique.
Tout au long de ce problème, les grandeurs physiques sinusoïdalement
oscillantes seront repré-
sentées par une grandeur complexe notée x(t) = Xe "f,
oreille externe
FIGURE 1 --- Schéma de l'oreille humaine
I. L'oreille externe : un pavillon acoustique
On considère l'air comme un fluide initialement au repos, c'est-à-dire tel que
les champs de
vitesse, de pression et de masse volumique s'écrivent :
dr, t) = 0 P(F,t) = P, p(F,t) = po
En présence d'une petite perturbation ces champs deviennent :
ü(r,t) Z Ü P(Ft) = Po+p(r,0) p(rit) = po + pa(r,t)
Et on fera l'hypothèse de petites perturbations par rapport à l'équilibre,
c'est-à-dire p/P5 1
et Pa/po EUR 1.
L'oreille externe se comporte comme un pavillon acoustique qui intercepte les
ondes planes acous-
tiques se propageant dans l'air pour les amener jusqu'au tympan. Pour
comprendre son utilité,
nous modélisons l'oreille externe par un tuyau circulaire d'axe z et dont la
section S(z) varie en
fonction de l'abscisse z (Figure 2). On s'intéresse alors au volume d'air situé
entre les abscisses
z et z + dz.
section S(2)
Y
FIGURE 2 - Schéma du pavillon acoustique
1. On souhaite établir l'équation qui régit la propagation dans ce conduit.
Pour cela on sup-
pose tout d'abord que les différentes grandeurs physiques ne dépendent
spatialement que de la
variable z. Dans quelle condition cette hypothèse sera vérifiée ?
2. Dans ce cadre, quelles conditions une transformation thermodynamique
doit-elle satisfaire
pour pouvoir être considérée comme isentropique ? Nous nous placerons
dorénavant dans cette
situation.
3. Donner alors la définition de la compressibilité, notée Yo, d'un fluide
subissant une transfor-
mation satisfaisant cette condition.
4. En déduire une relation, après linéarisation, qui relie p(z,t), pa(z,t), po
et Xo.
5. Exprimer la variation de masse du volume d'air situé entre les abscisses z
et z + dz pendant
un intervalle de temps dt.
6. Linéariser l'équation précédente pour obtenir l'équation de conservation de
la masse dans le
conduit considéré.
7. Appliquer la relation fondamentale de la dynamique à l'élément de volume
compris entre les
abscisses z et z + dz (remarque : on n'oubliera pas de prendre en compte les
forces de pression
dues au changement de section).
8. Linéariser l'équation précédente et ne garder que les termes d'ordre 1.
9. À partir des équations précédentes, obtenir l'équation de propagation des
ondes vérifiée par
la vitesse particulaire, v, dans un tel conduit :
ot? : OZ
-- ou C ----------
dv (35) | 2. 1
POoX0
On considère désormais que la section du conduit à un profil exponentiel du
type : S(z) = Soe 5.
10. Obtenir l'équation d'onde vérifiée par la vitesse particulaire dans cette
géométrie.
11. Quelle différence a-t-on par rapport à une équation d'onde en espace libre
dans un fluide
homogène ?
12. En déduire la relation de dispersion des ondes en cherchant une solution
sous la forme
v(z,t) = voe "= #t (k étant éventuellement complexe, que l'on notera k = k! +
ik").
13. À quelle condition a-t-on une solution dont le nombre d'onde est imaginaire
pur ? Est-ce
vérifié pour les fréquences caractéristiques de la parole (100 Hz - 1 kHz),
dans le cas de l'oreille
humaine où l'on considère que la longueur caractéristique du pavillon est Ô = 5
mm ? On rappelle
Cair = 340 ms !.
14. Application numérique. On considère une onde plane venant de z = --® dans
ce conduit.
Au niveau de l'entrée de l'oreille (z & -- 30 mm), l'amplitude est celle du
seuil de l'audition,
soit v1 -- 50 nm.s !. Évaluer la vitesse particulaire à 1 kHz au niveau du
tympan (2 -- 0)?
(remarque : on donne e° & 400 et on ne gardera que la solution de plus forte
amplitude au lieu
de faire la superpostion de 2 solutions).
15. Tracer l'allure de la solution v(z,t) retenue pour la fréquence de 1 kHz en
fonction de z, à
un instant { où cette vitesse est extrémale.
16. Conclure quant au rôle de l'oreille externe dans ce modèle.
IT. L'oreille moyenne
Les cellules sensorielles de l'audition sont situées dans l'oreille interne et
baignent dans un milieu
aqueux, alors que l'oreille externe est quant à elle située dans l'air. Il faut
donc que les ondes
acoustiques aériennes soient transformées en ondes se propageant dans un milieu
aqueux.
Afin de fixer les ordres de grandeur, nous considérons ici une onde plane
monochromatique de
pulsation w qui arrive en incidence normale sur une interface infinie entre
deux milieux fluides,
définis par leurs célérités c1 et c2 et leurs masses volumiques p1 et p2.
L'interface sera prise
comme le plan Oxy.
17. On note p;, p, et pr la pression des ondes incidente, réfléchie et
transmise, v;, v,. et vw, les
vitesses particulaires associées. En appliquant les relations de continuité à
l'interface, donner les
a p ._ p
expressions des coefficients de réflexion r = ?° et transmission 7 -- +7 en
pression.
LE; --À
18. Exprimer les coefficients de réflexion À et de transmission T des
puissances acoustiques en
fonction de p;, Dr, Dtr, Vi, Ur et Ur. Calculer R et T7.
19. Application numérique. Calculer l'intensité acoustique transmise à
l'interface air/eau. On
marteau 2 © enclume
étrier
section S.
oreille interne
FE --+
Per
" Fenêtre
ovale oreille externe
| tympan
section S:
pit tîer * s Ps
TR
Trompe d'Eustache ns
FIGURE 3 --- On modélise l'oreille moyenne (à gauche) par un système
masse-ressort qui relie rigidement
un piston du côté de l'oreille externe de section S; à un autre piston du côté
de l'oreille interne de section
Se. On note x(t) l'abscisse de ce second piston à l'instant t.
rappelle : pair = 1,25 ke.m ", Cair = 340 m.S_!, Peau -- 1000 ke.m * et Ceau =
1500 m.s_!.
L'oreille moyenne se trouve typiquement à une interface air/eau. Elle est
constituée du tympan
et de l'enchaînement de 3 osselets (marteau, enclume et étrier). Son
fonctionnement peut être
modélisé par un système de type masse-ressort (Figure 3).
20. Appliquer le principe fondamental de la dynamique pour établir l'équation
vérifiée par le
déplacement x(t) de l'extrémité de l'étrier (remarque : on considère qu'à la
position æ = 0 la
force exercée par le ressort est nulle).
dx(t)
dt :
21. Donner la définition de l'impédance acoustique Z0 en fonction de p.(t) et
de &(t) --
On supposera que l'impédance acoustique Z est réelle et égale à celle de l'eau.
22. En déduire l'expression du gain en pression G(w) -- p./p+ lorsque le
système est excité en
régime sinusoïdal (x(t) = zoe"*?).
23. Donner l'allure de la courbe de |G(w)| en décibels.
24. Quel type de filtre reconnaît-on ? En donner sa pulsation propre et son
facteur de qualité.
Quels sont les comportements asymptotiques de |G| à basses et hautes fréquences
?
25. Application numérique. Dans la pratique, le tympan a une surface $; de 70
mm° et l'extrémité
de l'étrier a une surface S4 de 3,3 mm°. Quelle est la valeur maximale du gain ?
26. En utilisant cette valeur de gain et le facteur de transmission trouvé
précédemment, donner
le facteur de transmission de la puissance acoustique à travers l'oreille
moyenne.
27. Pourquoi l'oreille moyenne est-elle nécessaire aux humains alors que de
nombreux poissons
en sont dépourvus ?
III. La cochlée : un spectromètre acoustique
Une fois qu'une pression à été générée dans l'oreille interne, il faut qu'elle
soit convertie en une
information utile pour le cerveau et ceci s'effectue essentiellement au sein de
la cochlée, une
partie de l'oreille interne. En 1863, Helmholtz montre que cet organe en forme
de colimaçon est
composé d'une succession de cordes vibrantes de longueurs L, variables
maintenues immobiles
à leurs deux extrémités (Figure 4).
28. Quels sont les fréquences et modes propres d'une corde de longueur L
maintenue immobile
aux deux extrémités ? (remarque : on donnera par exemple la forme du
déplacement vertical pour
les différentes fréquences propres).
29. Si on émet une onde monochromatique de pulsation w sur cet ensemble de
cordes, quelles
sont celles susceptibles de montrer un déplacement non uniformément nul ?
30. Si on part du principe qu'un potentiel d'action sera envoyé dans le cas où
le déplacement d'une
corde dépasse un certain seuil, en déduire que la cochlée se comporte comme un
spectromètre.
Von Bekesy a montré expérimentalement que la propagation dans la cochlée ne
peut pas être
simplement modélisée comme celle d'une onde plane se propageant dans un fluide
et nous allons
maintenant étudier cette onde particulière. La cochlée est un conduit qui a une
forme de serpentin,
séparé en 2 canaux différents par une membrane élastique. Pour simplifier, nous
étudierons la
géométrie quasi-unidimensionnelle présentée sur la Figure 4.b.
entrée du canal
vestibulaire
canal tympanique
cochlée déroulée
Helicotrema
FIGURE 4 -- a) Modèle de la cochlée selon von Helmholtz : une succession de
cordes vibrantes de longueurs
variables sont disposées le long de l'enroulement cochléaire (source : "On the
sensation of Tones", 1877).
b) Maquette originelle de von Bekesy pour décrire l'onde se propageant le long
de la membrane basilaire,
où la cochlée a été déroulée pour donner un guide droit (source : "Nobel
Lecture" de von Bekesy, 1961).
l6k 8k 4k 2kK Ik S500Hz | al FFF
ES
E
= S
5 G
S. @ 20 +
E =
Es =
[a En
| | ( RE +
ü 5 10 15 20 25 Ü 5 10 15 20 25
x (mm) x (mm)
FIGURE 5 --. Amplitude et retard de phase du déplacement vertical h(x,t) de la
membrane basilaire
lorsqu'on excite celle-ci en x = 0. x représente l'abscisse curviligne le long
de la membrane basilaire,
c'est-à-dire la distance linéique par rapport à l'entrée du canal vestibulaire.
On peut mesurer le déplacement vertical h(x,t) de la membrane en différents
points le long
de l'abscisse curviligne x, et ce pour différentes fréquences d'excitation. Le
résultat d'une telle
mesure est schématisé sur la Figure 5.
31. Commenter la mesure d'amplitude du déplacement et comparer au modèle simple
de Helm-
holtz.
32. Pourquoi ces mesures montrent qu'il y a eu propagation dans la cochlée ?
33. Quelle aurait été l'allure du retard de phase dans le cas d'une onde plane
dans l'air ? Com-
menter.
Il a été démontré que l'équation homogène qui régit le déplacement hA(x,t)
prend la forme :
d ch dh
D de 0 (1)
34. Quelle est la dimension de c?
Cette grandeur n'est pas une constante, et en régime monochromatique elle
satisfait la relation
suivante :
où d, wy et L sont des constantes, et où wy > w dans la gamme spectrale de
l'audition.
35. Ecrire l'équation vérifiée par a(x,t) = ch(x,t) = An(x)e #t.
36. Quelles seraient les solutions si c était une constante ?
Pour résoudre cette équation, on cherche une solution de la forme A(x) =
f(x)e"*9(®), où f et
g sont des fonctions à valeurs réelles. On supposera de plus g croissante. On
notera f" et f" les
dérivées première et seconde de f, et g' et g" celles de g.
22 A»
Ox?
37. Calculer Peter puis
38. En déduire le système de deux équations différentielles vérifiées par f(x)
et g(x) qui résulte
de l'équation d'onde.
Pour résoudre ce système, on fait l'approximation que l'amplitude de l'onde
varie lentement
devant sa phase. Mathématiquement, cela se traduit par f" EUR (wg')°f.
39. Obtenir la fonction g'(x).
40. À l'aide d'un petit graphique, démontrer si cela correspond au résultat
observé expérimen-
talement ?
41. Obtenir la solution f(x) à une constante multiplicative près.
42. En déduire la dépendance de |h(x)| avec c.
43. Tracer le comportement de [h(x)| en fonction de x.
44, Cela correspond-il au comportement observé expérimentalement ? Pourquoi ?